Elle n’est pas toute jeune cette histoire et pourtant, si vous lui posez la question, elle s’en souviendra comme si c’était hier. C’était un samedi de décembre, un 22 décembre même. Les gens dans les rues de Blüdhaven s’empressaient de tous terminer leurs achats de dernières minutes pour assurer les fêtes, et la famille de Kasey en était. Les jumeaux, ses frères ainés Seth et Kyle, avaient tendances à courir partout due à l’excitation de noël pour le plus grand malheur de leurs parents. Suivait ce petit groupe une fillette brune emmitouflée dans une grosse écharpe de laine faite main le visage à moitié couvert par un bonnet de même étoffe, à la main, une bande dessinée relatant une nouvelle aventure d’un héros d’un autre temps, les yeux braqués vers le ciel de décembre devenant de plus en plus sombre au fur et à mesure que les heures défilaient, laissant déferler sur la ville un flot ininterrompue de flocons blancs et froids qui avaient déjà recouverts les trottoirs. Alors que la troupe suivait son chemin, une dame sortant d’un magasin bouscula la petite fille victime de sa petite taille face aux grandes gens. Elle l’aida à se relever lui adressant milles excuses, la petite fille tout sourire lui répondit qu’il n’était rien, et poursuivit son chemin avant même de se rendre compte que ses parents n’étaient plus devant elle. Elle tourna le coin de la rue, et ne reconnut aucuns des visages qui se dressaient devant elle. La peur que connait tout enfant perdant de vue sa famille commençait à la gagner, et elle décida de rebrousser chemin, pensant les avoir loupé au détour d’une entrée de magasin, mais rien à faire, ils s’étaient, volatilisés.
Des fines perles salées commencèrent à rouler sur ses joues, sans un bruit, sans une plainte elle poursuivit sa route à l’aveugle dans les rues de Blüdhaven jusqu’à ce qu’elle finisse par s’assoir sur les marches de l’entrée d’une maison, pensant que la meilleure chose à faire l’lorsque l’on se perdait, c’était de rester au même endroit jusqu’à ce qu’on nous retrouve. Mais là, face à elle sur le trottoir d’en face, un garçon au blouson rouge avait le regard posé sur elle, le regard compatissant, comme s’il voyait qu’elle était entrain de pleurer. Allez savoir pourquoi, elle décida de le rejoindre, là l’enfant commença de nouveau à reprendre sa route, Kasey s’immobilisa au milieu de la rue, le petit garçon se retourna vers elle sans un mot, comme s’il l’invitait à le suivre, ce qu’elle fit comme l’enfant à l’humeur légère qu’elle était. Le garçon pressa le pas, suffisamment pour que la fillette décide de retirer ce fichu bonnet qui la gênait plus qu’autre chose. Ce manège dura presque 15 bonnes minutes avant qu’elle ne se rende compte, après avoir longtemps marché sans réfléchir, que la rue dans laquelle elle se trouvait était la sienne, et la maison devant laquelle elle s’était immobilisée portait sur la boite aux lettres le nom de « Da Costa ». Elle jeta un bref coup d’œil dans la direction où devait se trouver son bienfaiteur, mais il n’était déjà plus là tout comme la rue était elle-même complètement déserte.

- C’est comme dans mon livre…

S’exclama t’elle en jetant un rapide coup d’œil à la couverture de sa bande dessinée, avant de lâcher un frêle merci dans le vent et se diriger vers la porte de son chez elle.

Gotham et le doux plaisir d’ouvrir ses volets le matin, s’étirer à la bise glaciale du matin après avoir craché ses poumons soit à cause de la pollution des bas quartiers soit à cause de la crève chopé la nuit dernière à cause de la mauvaise isolation du logement, en avouant d’une honnêteté sans pareil, le visage marqué d’un large et pétillant sourire.

- Haaaa… ! Encore une bonne et magnifique journée qui s’annonce bien pourrie ! *snif snif* Hmm ! Mais qu’elle est cette odeur qui pue si bon tôt le matin comme ça ?

Elle se pencha par la fenêtre pour apercevoir une benne à ordures entrain de faire son œuvre dans un bruit fracassant de verre et de débris chutant et odorant. Elle fit mine de vouloir vomir avant de refermer rapidement sa fenêtre et se diriger vers le reste de ce modeste appartement situé dans les tréfonds de Gotham. La vie était faite de hauts et de bas, pour la famille de Kasey ces dernières années avaient été plutôt jonchées de bas. Ils furent obliger de vendre leur petite maison de Blüdhaven suite à l’arrivée des deux nouvelles sœurs de la jeune fille et la perte de l’emplois de son père, et le seul refuge qu’ils eurent trouvé ce fut ce pied à terre plus que modeste pour ne pas dire carrément précaire dont les murs venaient à chanter avec le monorail quand ce dernier passait, les camions poubelles et autres joies de la vie de tous les jours. Ce qui déplaisait à Kasey, ce n’était pas le fait de vivre dans un endroit pareil, non. C’était le fait de constater que des gens puissent vivre dans de pareil conditions dans une ville comme celle-ci, à croire que les gens plus hauts se voilaient la face sur la réalité ou ne voulait tout simplement pas voir que même dans une ville comme la maison de chèvre il pouvait y avoir des gens qui mourraient de faim. On en arrive parfois même à porter un regard différent sur certains criminels part moment, même si cela n’excuse en rien leur geste. Kasey était donc à présent la sœur d’une petite Billie et d’une petite Kaya, Kaya qu’elle soupçonnait à l’époque d’ailleurs être à l’aube de la création d’une nouvelle arme bactériologique à en juger par l’odeur s’échappant de ses couches…

Il y a quelques mois, elle eut une cruelle prise de bec avec son père qui n’arrivant pas à joindre les deux bouts, alors que les ainés et elle-même s’étaient proposés de travailler en dehors des cours pour les aider, leur père refusa insistant sur le fait que l’importance c’était d’avoir des diplômes. Mouai, c’est vrai que ça faisait genre pas mal encadré sur un mur… Même si la demoiselle préférait largement ses posters de Black Sabbath et Nirvana. En cours ce n’était pas la joie non plus, surtout que la veille elle avait surpris une conversation entre ses parents, son père disant qu’il n’avait pas le choix, qu’il devait se rendre sur les docs pour qu’ils puissent s’en sortir enfin. Kasey lui en voulait et était partie ce matin-là plutôt en rogne à cause de ça, cela n’allait pas s’arranger quand sur les écrans ils affichaient maintenant qu’un réseau de drogue avait été démantelés sur les docs et que plusieurs personnes avaient été arrêtées… Non le quater back de l’équipe n’aurait pas dû venir l’enquiquiner à ce moment précis, non il n’aurait pas dû la pousser violemment contre ce mur, ça lui aurait évité de se retrouver encastrer dans celui d’en face, mieux encore, de faire que la brunette ne se retrouve dans le bureau du directeur encore une fois avec un avertissement.

Le plus drôle survint le soir venu alors qu’elle venait de passer la porte de chez elle, personne à la maison, elle commença à réellement se dire que son abrutis de père s’était fait coffré quand quelqu’un frappa à la porte, elle s’apprêtait à ouvrir lorsque la voix d’homme derrière lui intima de se dépêcher qu’il était de la police… Kasey eu un réflexe, humain certes, mais très bizarre et surement pas le bon. Celui de prendre la fuite le plus rapidement possible par l’escalier de service. Elle entendit la porte se fracasser alors qu’elle passait par la fenêtre de sa chambre, profitant de son agilité qu’elle avait acquis lors de ses divers entrainement d’arts martiaux abâtardis et surtout du fait qu’elle pratiquait un style de déplacement très yamakasi dans la vie de tous les jours. Elle s’extirpa des cages de métal tentant même le grand saut arrivée au premier étage. Le flic voulu en faire de même afin de ne pas la perdre pensant certainement que si une gamine de 17 ans pouvait le faire…

- Aï ! Putain j’suis trop vieux pour ces conneries… !

Pas la meilleure réplique qu’il lui ai été donné d’entendre loin de là, mais en vue du contexte dans lequel elle avait été sortie, elle ne put s’empêcher de s’arrêter de courir et de se retourner pour voir le flic boitillant dans sa direction. Elle afficha un air désolée avant de lui proposer d’une voix à la fois compatissante et gênée d’appeler un médecin pour sa jambe. Vue le regard que ce type lui a lancé à ce moment-là, c’était peut-être pas la meilleure chose à dire…

- Okay... Fausse bonne idée... Vous vous êtes pas fait trop mal au moins ? Enfin je crois, j'espère. Tien c'est marrant vous saviez que j'voulais devenir flic ? Coïncidence hein !? Héhé... Herm... Heu, bon okay j'la ferme...

Le jeune femme baissa les yeux et fit mine de regarder vers le sol, pendant que l'officier s'avançait vers elle en se tenant la jambe.

- Bon j'suis désolée, mais pour ma défense vous vous apprêtez à faire une grosse erreur judiciaire et embarquer une pauvre fille qui rentre de l'école, j'ai rien fait je suis innocente et j'ai pas d'argent ni pour vous corrompre et encore moins pour payer un avocat qui n'aurait rien à défendre puisque je n'ai rien fait. A part peut être casser le nez d'un de mes camarades qui l'a bien cherché mais c'était pas moi là non plus j'ai rien fait, le mur s'est mis sur son chemin tout seul...

- Et ça vous arrive souvent de courir quand vous n'avez rien fait ?

- Ouai, les grands m'ont dit que quand j'entendais "police ouvrez" fallait que je le fasse c'était une question de survie. Vous voyez c'est pas ma faute à moi !

- Votre nom c'est bien Da Costa ?

- Négatif, j'suis un hachis parmentier qui danse la salsa... Vous voulez voir ? Et là je sais pas pourquoi mais mon instinct me dit que j'aurais pas du dire ça...

La nuit était plutôt fraiche ce soir-là, Kasey était postée au niveau des docs, en hauteur, à l’abri des regards et face à l’océan. Elle s’accordait un semblant de repos dans sa chasse à l’homme nocturne, vêtue d’une simple combinaison noire à laquelle la jambe droite et le bras gauche manquait de manière volontaire, pour un effet de style diront nous. Des cheveux teintés de violet, des lentilles de mêmes couleurs et sur son visage reposait un masque de couleur noir, elle portait dans son dos un sabre japonais normalement prévue à la décoration, mais quelque chose dans le rafistolage à peine apparent de l’objet indiquait qu’il ne devait plus être si décoratif que cela, à la ceinture, une arme à feu. Un glock 21 pour être même plus précis, qu’elle avait dut soit récupérer de son père, soit tout simplement se fournir auprès du gros bill du coin. Malgré le fait que la jeune femme sache parfaitement s'en servir, Elle préférait de loin le combat au corps à corps. Son but n'étant pas de sombrer dans la criminalité comme tout ceux qu'elle affrontait depuis quelques temps, elle se le refusait et quand bien même se pensait bien incapable de donner la mort à un autre homme, même avec la rage au ventre... Adossée à une cuve en fer froide, elle tirait une longue latte sur la cigarette qu’elle venait de coincer entre ses lèvres avant d’en recracher une épaisse fumée blanche, la nuit était calme, trop calme pour ne rien cacher en tout cas c’est ce qu’elle pensait.

Elle commença alors à prendre la direction du parc quand en chemin elle croisa enfin de quoi s’occuper, et pas des moindres, le genre d’affaires qu’il lui plaisait plus particulièrement de régler depuis l’accident de sa sœur remontant maintenant à 2 ans. En effet, Kasey avait grandit avec ces histoires héroïques et d'avoir vue son père sombrer dans la facilité criminelle de cette manière, alors que l'intégralité de la famille avait proposée toutes sorte d'alternatives à cela, la dégouta profondément surtout quand mis en prison, malgré le fait qu'il tentait de leur expliquer que c'était pour nourrir sa famille qu'il l'avait fait car son maigre salaire ne suffisait pas, la famille se porta encore plus mal qu'à l'origine. Ce qui fini de l'achever, c'était de voir à quel point l'homme pouvait être vil envers plus faible que lui…

Il y a deux ans, alors que la jeune Billie rentrait de ses cours et qu'elle prenait comme à son habitude le raccourcis près de chez les Sanders, elle se retrouva coincée entre plusieurs jeunes gens de son âge qui n'avaient pas comme arrière pensée de l'arrêter pour lui demander l'heure, mais plutôt assouvir un sorte de soif de violence débile et écœurante qui consistait à forcer la jeune fille à avoir des rapports avec eux. Ce soir là, Billie avait hurlé à l'aide, imploré la pitié un nombre incalculable de fois, mais personne n'intervint, personne ne fit quoi que ce soit pour les en empêcher, préférant même fermer fenêtres et volets pour ne rien entendre.

On suggéra bien à la famille de porter plainte à l’hôpital, mais Billie étant dans l'incapacité de mettre un visage sur ses agresseurs en vue de son état, la police n’eut pour réponse qu'un "on ne peut rien faire pour vous" ce que Madame Da Costa accepta, sans se battre, sans broncher, les larmes aux yeux comme au tribunal pour son mari. Le sang de sa fille par contre ne fit qu'un tour et ses pensées s’entrechoquèrent dans sa tête. Alors c'était ça la vie ? On pouvait donc vivre de cette façon sans que ça ne dérange personne ? Comme si l'existence des gens aux pauvres moyens avaient si peut de valeur ? tellement inexorable, tellement rien du tout ? Mais ils pouvaient crever dans l'incompréhension! Crever dans le silence! Crever dans l’indifférence générale... Crever dans l'idée qu'ils courberont le dos encore et toujours. Dur constatation, mais c'en était trop pour elle, la peur que sa mère transpirait à chaque fois qu'elle voyait ses enfants passer la porte Kasey n'en voulait pas, elle avait beau l'aimer la jeune femme ne voulait pas lui ressembler, accepter l'inacceptable de cette situation qui était familière à beaucoup plus de gens qu'on ne pouvait le croire dans ces bas fonds.

C'est cela qui la poussa à aujourd'hui se dissimuler derrière un masque et mener SON combat pour la justice puisque les autorités soit disant compétentes n'en faisaient rien, que personne ne voulait prendre la défense des plus faibles préférant au contraire en profiter pour répandre leur venin dans les rues, Elle les affronterait, Elle serait un rempart contre le vice. Et ce soir là, tomber sur une situation aussi similaire que familière, la justicière qu'elle était en frissonnait derrière son masque, comme si quelque part elle s'apprêtait à venger sa sœur ou même toutes les femmes qui avaient pus connaître cela.
Elle se faufila dans la ruelle profitant des ombres pour ne pas se faire remarquer, et arrivé à leur hauteur, elle afficha un sourire radieux quoi que l’attitude carnassière sur les bords si on s’y prenait trop.

- Houuu… La belle brochette de vainqueurs, 4 contre une seule et unique personne qui vraisemblablement ne sait pas se défendre. Non vraiment les gars je suis impressionnée, quel talent, quelle classe, quel charisme ! Du grand art !

Elle accompagna ses dernières paroles d’un applaudissement à deux mains plus qu’ironique, l’un des type tendant sa lame, un maigre cutter, dans sa direction.

- A jeni xheloz? Tou veux pout-être t’é joindre à nous ?

Dit-il d'un accent horrible en laissant la jeune femme s’enfuir à toute jambe, Kasey haussa un sourcil troublée par cette remarque.

- A jeni xheloz ? T’as insulté ma mère en Klingon là nan ?

Les quatre hommes s’avancèrent alors dans l’intention d’attaquer, s’en suivit un combat plus lamentable qu’il ne devait en être comique à voir pour une personne qui avait pu assister à la scène depuis le début. Kasey avait une manière bien à elle de se battre, mélangeant les arts martiaux traditionnels auxquels elle avait pu avoir accès après avoir fait couler sang et eaux pour pouvoir obtenir une licence, et vraisemblablement des pas de dance. Bien entendus, l’arme logée dans son dos n’était pas là pour faire jolie non plus, mais chose à remarquer, elle avait tendance à ne jamais frapper du tranchant. Une fois que les hommes furent pour certains maîtrisés et les autres mis en fuite, elle releva l’un des deux hommes à terre, se tenant les côtes et vint déposer un baiser sur sa joue trempée, laissant une belle empreinte de maquillage noir sur cette dernière, suite à qui elle lui susurra à l’oreille.

- La prochaine fois, tu demandes à la dame si elle est d’accords, et si elle te dit « non » tu passes ton chemin. Parce que si tu ne passes pas ton chemin, Velvet Sky viendra de nouveau te botter le cul chéri, et tu n’as pas envie que Velvet te botte ton joli petit cul de gosse prépubère qui s’extasie encore devant des magazines cochons parce que c’est le seul moyen qu’il ait de voir l’entre jambe d’une dame… Alors chéri pitié, la prochaine fois que ça te prend ce genre de pulsions, fais des scoubidous ou du tricot c’est mieux…

Puis elle le relâcha dans une position plus ou moins déconcertante, les fesses en l'air et son camarade en dessous. Elle sorti d'une petite sacoche à sa ceinture, un polaroïde avec lequel elle prit deux clichés, l'un qu'elle laissa retomber aux pieds des deux hommes et le second qu'elle agita fièrement en annonçant qu'elle l'ajouterait à sa collection de bouseux, avant de reprendre son chemin tranquillement. Kasey ne se l’avouait pas, mais elle adorait jouer ce jeu du chat et de la souris avec les criminels de cette ville, surtout ceux qui n'en avait que le nom. Si biensûr elle venait à se retrouver sur la route d'un grand nom de la pègre, elle ne refuserait pas de frapper même si à l'heure actuelle, elle ne s'en sentait pas encore capable. Et même si ce n’était pas ce soir que la folie courrait les rues, cela n’en demeurait pas moins une petite victoire assez jouissive sur le monde des petites frappes et c’était toujours ça de gagné.