Avant elle, quelques années auparavant, ses parents se rencontrèrent dans des circonstances que l'on pourrait aujourd'hui qualifier d'extraordinaires, mais qui, pour l'époque, paraissaient plus banales que jamais. Son père, Ra's Al Ghul, autrefois mercenaire, s'éprit de la fille d'un chef de guerre arabe. Leur histoire ne dura qu'un temps : la jeune femme était surveillée telle l'émeraude de leur peuple. Très vite, le dit chef et géniteur de la princesse mit la main sur celui qui avait voulu « voler son trésor », et le condamna non pas à la mort, mais à la prison à perpétuité. Mais c'était tout comme. Cet endroit avait été construit par des monstres pour y abriter leurs semblables. Le même raisonnement en avait fait un enfer terrestre, et ce depuis bien des années déjà. La princesse, tant amoureuse qu'hardie, offrit la liberté à son amant en priant son père de l'y envoyer à sa place. Il respecta le choix de sa progéniture et laissa partir Ra's qui, plus tard, formera la Ligue des Ombres. C'est donc cette femme qui descendit dans cette fosse sans nom, portant un enfant depuis trois mois déjà.

Cinq mois plus tard, l'enfant naquit dans les ténèbres de la prison. Ce fut la seule présence médicale qui l'aida à accoucher, et permit à l'enfant de pousser son premier cri sans qu'une foule de prisonniers ne veuillent s'en prendre au bébé. La nourriture étant moindre, sans nuls doutes ils se seraient servis de cette carcasse sans nom pour apaiser leur faim. Cet enfer n'était plus peuplé d'hommes mais de bêtes sanguinaires, qui se regroupaient sans véritablement croire en leur unité. C'est dans la sueur, les larmes et le sang que la petite vit le « jour ». Alors, sa mère, autrefois princesse, souffla son prénom : Talia.

Pendant longtemps, elle pleura à chaudes larmes, chose qui était impossible d'arrêter. C'était sans doute l'obscurité qui l'effrayait, et cela, sa mère l'avait bien comprit. La mère et sa fille étaient enfermées volontairement dans une geôle non pas par punition mais pour être en sécurité. Le verrou était tellement soudé que personne ne pourrait l'ouvrir sauf un colosse. La seule chose dont Talia se souvient est cette flammèche, cette chaleur aveuglante que provoquait le feu que lui avait fait découvrir sa mère. Les nuits étaient très fraiches et s'y rapprocher était que pur bonheur. Souvenirs d'une petite enfance, car elle n'avait pas plus de trois ans à ce moment-là. La nuit suivante, l'un des prisonniers vint aux barreaux pour pouvoir lui parler. Il avait déposé sa capuche en toile sur sa tête, et seules ses lèvres lui étaient visibles. Sa mère était assoupie sur le tapis qui leur servait de literie, mais la petite Talia, elle, ne parvenait pas à trouver le sommeil. Les râles et les discussions houleuses des autres prisonniers, tous des hommes sans exception, la rendaient anxieuse. Lorsqu'il s'était mit à lui parler, son petit cœur avait fait plusieurs bonds dans sa poitrine. Elle avait finalement quitté le tapis pour pouvoir s'approcher des barreaux. La douceur de ses mots réussirent à toucher son âme d'enfant, qui finit par lui toucher le visage de sa main froide.

Quelques semaines plus tard, le drame. Alors que le médecin était allé chercher des vivres, il ne prit la peine de refermer derrière lui. Erreur qui fut fatale pour la mère de la petite fille, qui se vit être prise d'assaut par les prisonniers, qui la tirèrent par les cheveux pour ensuite la violer sans autre forme de procès. Prise de panique, la gamine se mit à pleurer, mais n'eut la force d'hurler. C'était les cris de sa mère qui la bouleversait. L'un des prisonniers tenta de la prendre elle aussi, mais un homme qu'elle connaissait de voix plus que de visage l'attrapa dans ses bras et sortit de la geôle pour se tapir dans un coin, là où lui-même avait vécu, au beau milieu de la bestialité de ses congénères. Effondrée, la gamine se recroquevilla, captant la chaleur humaine de son protecteur.

Mais peu après, la volonté de tuer la fille de leur tortionnaire les regagna. Cette fois-ci, son protecteur eut fait le maximum, mais ce ne fut pas assez. Il l'incita à gravir les murs de la prison pour s'en échapper. Nombre de détenus tentèrent l'ascension sans pouvoir y retrouver la lumière du jour. L'enfant, guidée par la peur, grimpa à la première pierre pleine, et sécha ses larmes. Ce fut à cet instant qu'elle vit son ami, son frère, et même son père, se faire assaillir par les prisonniers.


Dépourvue de corde, elle parvint à sortir du gouffre et à retrouver une terre qu'elle n'a jamais connue. Aveuglée par les rayons du soleil, elle plaça sa capuche sur sa tête et se mit à courir vers l'inconnu, le visage de son protecteur gravé dans sa mémoire.

Du haut de ses sept ans, elle survécut, rejetant avec un certain dégoût tout représentant de la gente masculine. Elle fut recueillie par une vieille tisseuse de tapis qui vivait reclus de la ville. Veuve, elle lui apprit à tisser mais également tous ces sentiments merveilleux qu'elle n'avait pas pu goûter au fond de la prison. Chaque nuit, elle s'assoupissait à contre-cœur, bercée par des cauchemars qui n'avaient absolument rien à envier de la réalité. Elle se réveillait en sursaut, voyait des choses se dessiner sur les murs, même le peu de mobilier qu'il y avait se transformait en d'horribles monstres. Arrivée à ses onze ans, la gamine s'en alla en ne laissant rien d'autre derrière elle qu'un voile en tissu qu'elle avait elle-même fabriqué pour la vieille femme.

Suite à des vols organisés par sa propre initiative, elle retrouva Ra's Al Ghul. Ou plutôt, ce fut lui qui vint à elle alors qu'il se trouvait maître de la Ligue des Ombres, tristement connue pour ses combattants d'élite et ses idéaux machiavéliques. Il la prit sous son aile et l'initia à l'art du combat, lui transmettant son savoir. Ensembles, ils accomplirent quelques missions pour la gloire de l'organisation, néanmoins, un visage revenait sans cesse dans son esprit : celui de Bane.

Lorsque Ra's Al Ghul perdit son combat contre Ducard, qui devint le nouveau chef de la Ligue des Ombres, reprenant le même nom, comme la tradition l'exigeait. Talia l'incita à purifier la fosse, mais l'empêcha de commettre l'irréparable vis à vis de son protecteur. Bane fut tiré d'affaire, et ce grâce aux paroles de l'enfant qu'il avait prit sous sa protection. Ce fut avec effroi qu'elle constata l'ampleur des blessures qu'il avait subies, tellement qu'elle se décida à l'aider et à lui transmettre autant d'affection qu'il avait pu lui en donner. Fort heureusement, il fut opéré et put survivre grâce à un masque lui administrant du gaz anesthésiant. La douleur n'était plus, et cela, elle en était rassurée. Tout deux eurent un enseignement au sein de la Ligue, mais rapidement, Ra's jalousa la relation entre Bane et Talia, remarquant qu'elle portait beaucoup plus dans son cœur l'homme masqué que son propre père. Suite à cela, il excommunia son protecteur. Talia, folle de rage, se laissa au désespoir et réduisit considérablement son activité au sein de la Ligue, préférant se perdre dans ses tristes souvenirs. C'est ainsi qu'elle vint à Gotham City pour pouvoir y vivre sous une autre identité : Miranda Tate, fidèle membre de Wayne Entreprises.

Étrange fut la réaction de Talia lorsque son père fut tué par Batman : elle en fut soulagée. Elle reprit la direction de la Ligue des Ombres et vint à la rencontre de son ancien ami, Bane, à qui elle offrit une nouvelle place près d'elle et des siens. Aujourd'hui, ils sont de nouveau réunis dans la ville la plus corrompue du monde, et elle compte bien être la cause même de sa fin. Pour l'équilibre et la paix.